Loyauté, fidélité, générosité, courage, abnégation, dévouement, sincérité … autant de mots qui collent à la personnalité de Jakub Blaszczykowski, sans doute le joueur de foot numéro 1 dans le cœur des Polonais. Il faut dire que l’homme est très engagé dans différentes associations caritatives, il a d’ailleurs fondé la sienne Ludzki gest qui soutient les enfants et les adolescents hospitalisés. Puis Kuba, c’est aussi un petit garçon qui a vu son père poignarder sa mère sous ses yeux alors qu’il n’avait que 11 ans. Du jour au lendemain tout s’écroulait pour lui, sa mère assassinée, son père en prison, le jeune Kuba partait alors vivre chez sa grand-mère Felicja avec son grand-frère Dawid (âgé de trois de plus) et allait grandir sous la protection bienveillante de son oncle, l’actuel sélectionneur polonais, Jerzy Brzeczek. De cette fracture de la vie à ses gestes de bienveillance, en passant par cette façon de ne jamais tricher, de faire preuve d’une probité à toute épreuve, d’une fidélité et d’une loyauté sans borne, c’est comme cela que celui qui est surnommé Kuba s’est imposé et a désormais une place si particulière dans les cœurs de nombre de ses concitoyens et concitoyennes, qu’ils s’intéressent au football ou pas.
Du Rakow au Wisla
Kuba est né le 14 décembre 1985 à Turkolas, ville située à quelques kilomètres de Czestochowa où Jakub et son frère jouent. Si Kuba passe par l’équipe de jeunes du Gornik Zabrze, il retourne très vite au Rakow Czestochowa.
Très en vue, il est sollicité par des clubs étrangers mais la priorité est, pour lui comme pour ses proches, qu’il reste en Pologne. C’est le Lech Poznan qui tient la corde à l’hiver 2005 mais les représentants du joueur et ceux des Kolejorz n’arrivent pas à s’entendre. Jerzy Brzeczek, oncle du joueur et actuel sélectionneur de l’équipe nationale polonaise, se tourne vers son vieil ami, ex-coéquipier de l’épopée olympique de Barcelone 1992 et alors directeur sportif du Wisla Krakow, Grzegorz Mielcarski. C’est comme cela que le 8 février 2005, Kuba rejoint le Wisla pour la modique somme de 70 000 zlotys, ce qui reste à ce jour, le meilleur investissement du club puisqu’il rejoindra le Borussia Dortmund deux ans plus tard pour plus de 3 millions d’euros. Dès son arrivée, Jakub s’impose dans le 11 du Wisla. Pour son premier match en Coupe de Pologne, le 16 mars 2005 face au Polonia Varsovie, il ne lui faut que petites 3 minutes pour marquer son premier but sous ses nouvelles couleurs. 11 matchs et trois mois plus tard, Kuba est sacré champion de Pologne ! Les deux saisons suivantes sont moins réussies. Si le Wisla est vice-champion de Pologne lors de la saison 2005-2006 (derrière le Legia), le « white star » ne termine qu’à la 8ème position de l’édition 2006-2007.
16
Depuis le début de sa carrière, Kuba arbore le numéro 16. Si l’on peut penser qu’il s’agit d’une volonté de prendre un numéro 7 déjà pris (1+6 = 7) par un coéquipier (Damian Gorawski à l’époque) et par tant de grands joueurs dans l’histoire (Best, Cantona…), il n’en est rien. Kuba explique dans sa biographie que : « les footballeurs attachent souvent une grande importance à leurs choix de numéros, et qu’ils les choisissent souvent en fonction d’une signification particulière, mais ce n’est pas mon cas. Toutefois, je n’ai jamais voulu le changer. Je dois avouer que je m’y suis habitué et je ne peux pas imaginer jouer avec un numéro différend sur le maillot ».
Dortmund
A l’été 2007, Kuba quitte la Pologne et s’engage avec le Borussia Dortmund. Il signe un contrat de 4 ans et il y restera le double. L’année suivante, Jurgen Klopp prend la tête de l’équipe. La suite, on la connaît, Blaszczykowski devient un lieutenant de l’actuel entraîneur de Liverpool. Les deux hommes partagent les mêmes valeurs d’abnégation et de loyauté.
En 2010, Kuba est rejoint au Borussia par Robert Lewandowski (en provenance du Lech Poznan) et par son ami Lukasz Piszczek (qui arrive du Herta Berlin). Le trio polonais est très actif dans les titres de champion d’Allemagne décrochés en 2011 et 2012 (année du doublé puisque cette année-là, Dortmund remporte aussi la Coupe d’Allemagne). En 2013, les Polonais du Borussia sont très proches du titre ultime et s’inclinent en finale de Ligue des champions face aux ennemis du Bayern Munich. Après une Super coupe d’Allemagne en 2014, Lewandowski rejoint le Bayern puis en 2015 Klopp part à Liverpool et Kuba est prêté à la Fiorentina après 8 saisons, 32 buts et 52 passes décisives !
Fiorentina
Lors de la saison 2015-2016, Kuba joue 20 matchs sous le maillot de la Viola, marque à deux reprises et réalise 4 passes décisives. Si la Fio termine à la 5ème place, le bilan pour Jakub reste très mitigé, il faut dire qu’il connaît une grosse blessure musculaire qui l’éloigne des terrains entre octobre et décembre 2015.
VFL Wolfsbourg
La saison suivante, Kuba est de retour en Bundesliga. Il est transféré au VFL Wolfsbourg après son bon Euro 2016, pour 5 millions d’euros. Hélas, Kuba peine à retrouver son niveau d’antan. Il est de plus gêné par ses blessures récurrentes. Pire, de novembre 2017 à avril 2018, il est éloigné de toute compétition afin de soigner des douleurs à répétition au dos. En 2019, d’un commun accord, Kuba et les représentants du VFL Wolsbourg décident d’une rupture de contrat à l’amiable.
Wisla – épisode II
A l’hiver 2019, Jakub Blaszczykowski retourne au Wisla alors à deux doigts de la faillite. Il s’engage corps et âme dans le plan de sauvetage du club amorcé par Jaroslaw Krolewski et Tomasz Jazdzynski, prête plus d’un million de zlotys au club et signe un contrat de six mois. Il s’impose le salaire minimum d’un joueur de foot polonais, c’est-à-dire, 500 zlotys par mois (100 euros environ). La grande classe !
La sélection
Kuba fait sa première apparition en sélection, le 28 mars 2006, lors d’un match amical face à l’Arabie saoudite (victoire polonaise 1-2). Mais l’histoire du joueur et de la sélection tarde à débuter véritablement. En 2006, blessé, il rate la Coupe du monde en Allemagne. Idem deux ans après, Kuba est de nouveau « out » et ne fait pas partie de l’échec de l’Euro 2008 signé Beenhakker, alors qu’il avait été un grand artisan de la qualification, entre autres, en marquant son premier but sous les couleurs de la sélection, le 22 août 2007 lors d’un match à Moscou, face à la Russie (2-2). Heureusement pour lui, il est de la « fête » lors de l’Euro 2012 à domicile. Hélas, les Polonais se manquent complètement et sont éliminés dès les phases de poules. Peu importe, c’était l’occasion pour lui de se rendre bel et bien compte qu’il est LE chouchou du public polonais. En 2016, Kuba est aussi du voyage en France. On ne va pas se mentir, la Pologne n’a jamais été aussi proche de remporter pour la première fois de son histoire, une grande compétition internationale que lors de cet Euro 2016.
Euro 2016
Lors du premier match face à l’Irlande du Nord, les Polonais s’imposent à l’Allianz riveria de Nice 1-0 grâce à un but de Milik, la passe décisive est signée… Kuba Blaszczykowski !
Le second match face aux Allemands est une véritable partie d’échec qui se solde sur un bon vieux 0-0 qui arrange les deux équipes. Le troisième match est clairement mythique et il oppose Polonais et Ukrainiens au stade vélodrome de Marseille. Les Polonais l’emportent 1-0, Milik fait une passe décisive à … Kuba ! Qui célèbre son but, comme tous ses buts, en levant les mains et en regardant le ciel, en hommage à sa mère décédée.
En 1/8ème de finale face à la Suisse, c’est encore Kuba qui marque et ouvre le score à la 59ème minute, les Polonais tiennent et mais ne résistent pas. A la 82ème minute, d’un geste acrobatique, Shaqiri égalise. Le suspense tient jusqu’aux tirs au but. Les Polonais font un perfect (Lewy, Milik, Glik, Kuba, Krycho) tandis que Xhaka manque le sien. La Pologne est qualifiée. Le 30 juin 2016 à Marseille, l’adversaire du jour n’est autre que le futur vainqueur de l’épreuve : le Portugal. Les deux équipes ont sensiblement le même niveau et tout est jouable. D’ailleurs, Lewandowski ouvre le score dès la 2ème minute. Ensuite la Pologne laisse trop venir les Portugais, se contente de défendre en oubliant de jouer. Stratégie perdante car dès la 33ème, Renato Sanches égalise pour le Portugal. S’en suit un match laborieux et ennuyeux qui nous emmène à nouveau aux tirs au but. Ronaldo et Lewandowski marquent le premier penalty, Sanches et Milik le second, Moutinho et Glik le troisième puis vient le quatrième TAB. Nani marque le sien puis Kuba rate le sien. Quaresma marque le dernier tir au but qui qualifie les Portugais et élimine les Polonais. Le fait que ce soit Kuba qui ait manqué ce tir, après avoir fait un magnifique Euro 2016 est symptomatique du manque de chance du joueur. Un joueur qui à nouveau, à l’occasion de cet Euro, découvre qu’il est le préféré de la sélection. Une sélection qui aurait pu aller au bout de l’épreuve tant les joueurs polonais marchaient sur l’eau et jouaient tous à un niveau bien au-delà de leur niveau habituel. Jedrzejczyk placé pour l’occasion latéral gauche affichait de très bonnes performances, Milik et Lewy assuraient l’essentiel en attaque, Piszczek, Glik et Pazdan tenaient la défense et au centre Krychowiak et Maczynski avaient eux aussi un rendement bien supérieur à leurs habitudes. Les remplaçants Kapustka, Peszko, Jodlowiec étaient eux aussi, à chaque rentrée, très bons. Inutile de dire qu’avec une passe décisive et deux buts importants, Kuba a été le meilleur joueur polonais de cet Euro 2016.
En 2018, bien qu’honorant sa 100ème sélection lors de la défaite face au Sénégal (1-2), Kuba a comme l’ensemble de ses coéquipiers, raté la Coupe du monde chez le voisin et ennemi russe.
Et maintenant …
4 buts en 6 matchs avec le Wisla en 2020, après avoir sauvé financièrement le club l’an passé, il était en train de le sauver sportivement avant que la crise du koronawirus ne vienne interrompre le championnat. Face à cette crise, Kuba a déjà fait un don de 400 000 zlotys, il a mis sa fondation au service de la lutte contre le virus et a fait part de sa volonté de faire des efforts financiers (encore) pour aider le Wisla. C’est pour cela, entre autres, qu’il est le joueur préféré des Polonais et dans les cœurs de ses compatriotes pour pas mal de temps encore…