Ces dernières années, on entendait souvent parler de traîtres dans le football polonais quand il était question de Miroslav Klose, Lukasz Podolski et Piotr Trochowski, tous trois nés en Pologne et qui ont choisi de jouer pour l’équipe nationale allemande. Mais il existe bien pire et dans l’histoire du foot polonais, il existe un joueur qui a évolué pour la sélection polonaise puis pour l’Allemagne nazie : Ernest Wilimowski
Ernest Wilimowski Otto est né le 23 Juin 1916 à Katowice, dans la province prussienne de l’Empire allemand. Il est né sous le nom de son père tué sur le front de l’Est pendant la Première guerre mondiale : Prandelle. Il a treize ans quand sa mère se remarie un officier polonais – Roman Wilimowski. En épousant la mère, l’officier donne son nom de famille au fils.
Ernest Wilimowski commence sa carrière de joueur au FC Kattowitz, et malgré ses six orteils au pied droit, est rapidement transféré vers le KS Ruch Wielki Hajduki (futur Ruch Chorzow) en 1934 . Peu de temps après, le 21 mai 1934, Wilimowski jouait dans l’équipe nationale polonaise face au Danemark à Copenhague. Avec le Ruch, Wilimowski est sacré champion de Pologne en 1934, 1935, 1936 et 1938. Il est meilleur buteur du championnat en 1934 et 1936. Au total, avec le Ruch, il a marqué 112 buts en 86 matches.
Le 5 Juin 1938, lors d’un huitième de finale de Coupe du monde au Stade de la Meinau de Strasbourg, la Pologne est opposée au Brésil favori de la compétition. Dès la 18ème minute, Léonidas ouvre le score pour le Brésil. Pas le temps de douter pour la Pologne qui égalise cinq minutes plus tard sur un penalty inscrit par Scherfke. Romeu et Péracio (25ème et 44ème minute) donnent l’avantage au Brésil 3-1. Wilimowski inscrit deux buts à la 53ème et à la 59ème minute. 3-3. A la 71ème Péracio marque à nouveau. La victoire semble se dessiner pour le Brésil mais à la 89ème minute, Wilimowski égalise à nouveau. Dans les prolongations, Léonidas marque à deux reprises (93ème et 104ème) et Wilimowski marquera à nouveau à la 118ème mais trop tard. Avec ses quatre buts dans un match de Coupe du monde, Wilimowski sera détenteur du record de buts en un match (comme Eusebio, Just Fontaine, Butragueno et Kocsis) jusqu’en 1994 où Salenko a marqué 5 buts dans le match opposant Russie et Cameroun. A l’issue de ce match Leonidas a déclaré : « Le premier qui me dit que les Polonais ne savent pas jouer au foot, je lui crache au visage. »
En 22 rencontres sous le maillot polonais, Wilimowski a marqué 21 buts dont trois le 27 août 1939 à Varsovie contre la Hongrie, vice-championne du monde. La Pologne s’imposait 4-2 pour ce dernier match de Wilimowski sous les couleurs polonaises. 4 jours plus tard, l’Allemagne nazie envahit la Pologne.
Très vite après le début de la Seconde Guerre mondiale, Wilimowski qui remplissait toutes les conditions pour recevoir la citoyenneté allemande changeait de nationalité. En 1942, il jouait pour le Munich 1860. En 1941 et 1942, Wilimowski jouera à huit reprises sous le maillot de l’Allemagne nazie. Paradoxe, il a dut intervenir pour faire libérer sa mère Pauline-Florentyna (décédée en 1981) alors internée au camp d’Auschwitz.
Après la guerre, Ernest Wilimowski se maria et eut quatre enfants. Il a travaillé aux usines Pffaf avant d’être retraité en 1978 et de décéder le 30 aout 1997 à Karlsruhe sans jamais être retourné en Pologne où il avait une image de traître à la nation très lourde à porter. En 1995, il avait l’occasion de revenir car il était invité dans le cadre des festivités du 75 e anniversaire de Ruch Chorzow mais en raison de sa maladie et surtout face aux nombreuses divergences et animosités que ce retour suscitait, il renonça. A ce moment, le plus célèbre commentateur sportif polonais Bohdan Tomaszewski (qui avait participé à l’insurrection de Varsovie) le qualifia publiquement de « traître »…